Le Bienfaiteur de l’Humanité
Cité comme « le Bienfaiteur de l’Humanité », la France a honoré Louis Pasteur, pour ses travaux et pour ses recherches permettant de sauver de nombreuses vies humaines.
Dès l’application de la méthode antiseptique dans les opérations chirurgicales, la mortalité est passée de 50 % à 5 %.
Ses découvertes et ses procédés qu’il a livrés au domaine public,ont permis aux industriels, et aux professionnels du monde agricole d’en bénéficier.
Il est très facile de comprendre la reconnaissance du monde entier pour la découverte de la vaccination contre le charbon, évitant ainsi la perte de milliers d’animaux.
Le grand physiologiste anglais Huxley déclarait que « Les découvertes de Pasteur suffiraient à elles seules pour couvrir la rançon de guerre de cinq milliards payés par la France à l’Allemagne en 1870 » .
Vocation et goût passionné pour les Sciences
Louis Pasteur est né à Dôle le 27 décembre 1822. Issu d’une famille modeste, son père était tanneur, il commence ses études au collège d’Arbois, puis au lycée de Besançon et est reçu à l’Ecole Normale. Agrégé des Sciences physiques en 1845 et préparateur de chimie à l’École Normale, il devient docteur ès sciences en 1847, professeur de physique au lycée de Dijon en 1848, professeur suppléant de chimie à la faculté des sciences de Strasbourg en 1849, titularisé en 1852.
En 1854 il est nommé professeur et doyen de la Faculté des Sciences de Lille. Il quitte cette Faculté en 1857 et le Recteur de Lille annonça que « Notre Faculté perd un professeur et un savant de premier ordre. Vous avez pu vous-mêmes, Messieurs, apprécier plus d’une fois tout ce qu’il y a de vigueur et de netteté dans cet esprit doué d’une si grande puissance de travail et d’une si rare aptitude pour les sciences ».
Louis Pasteur est alors nommé administrateur à l’École Normale et directeur des études scientifiques.
Il transforme quelques pièces du bâtiment en laboratoire et fonde « l’institution des agrégés préparateurs ».
En 1853, il est nommé professeur de géologie, physique et chimie appliquée, à l’École des Beaux-Arts.
En 1857 il est nommé professeur de chimie appliquée à la Sorbonne.
Il démissionne de ses fonctions administratives à l’École Normale et abandonne son poste de professeur à l’école des Beaux-Arts.
Il est élu à l’académie des Sciences en 1852 dans la section minéralogie, et en devient le secrétaire perpétuel en 1887 [ il donnera sa démission en janvier 1888 pour cause de maladie] .
Il est également élu membre de l’Académie de Médecine en 1873, et élu membre de l’Académie Française en 1881.
Une vie d’efforts et de travail
Il est difficile de résumer tous les travaux et les découvertes de Louis Pasteur. Après ses premiers travaux de physique sur la dissymétrie moléculaire, on peut citer ses expériences sur la génération spontanée, sur les fermentations, sur les maladies des vins et des vers à soie, sur la fabrication de la bière, du vinaigre, sur la création de vaccins à partir de virus, sur le charbon et la rage. Que de conquêtes scientifiques ! Quel travail accompli par effort et par conviction.
Ne disait- il pas: « La société est une armée, son moyen d’action est le travail. Mais à notre époque, le travail est trop souvent considéré, non pas comme la règle de l’humanité et le et le fondement des sociétés, mais bien comme une nécessité que chacun cherche à éluder dans la mesure du possible. De là, le peu de scrupules
de certaines gens sur le choix des moyens».
En dehors du travail, qui était pour lui «sa raison de vivre», Louis Pasteur n’a jamais accordé un grand intérêt pour les mondanités qu’il considérait comme une perte de temps.
René Valléry-Radot écrit dans son ouvrage LA VIE DE PASTEUR que :« tout était subordonné aux exigences du laboratoire, mais du laboratoire seul.
Jamais Pasteur n’acceptait de se rendre à une de ces grandes soirées mondaines qui ne sont qu’une forme de l’impôt du temps prélevé par les oisifs sur les gens qui ont quelque chose à faire, sur les hommes célèbres surtout. Également rayée toute soirée au théâtre».
Un bref désir politique
Le 27 juillet 1870, Pasteur est nommé sénateur de l’Empire par un décret qui, du fait de la guerre, ne fut jamais promulgué. Il écrira dans un courrier adressé aux Électeurs Sénatoriaux en 1876 : «Vous n’oublierez pas que j’avais été nommé sénateur le 27 juillet 1870 « pour services rendus à la Science, que cette nomination fut sans effet, et qu’elle était si peu politique que la République a honoré ces mêmes services d’une récompense également exceptionnelle…»
La guerre est déclarée le 19 juillet 1870. La capitulation de Sedan (2 septembre 1870) et l’arrestation de l’Empereur Napoléon III, lui font écrire le 5 septembre 1870, au Maréchal Vaillant : «Maréchal. Je suis brisé par la douleur . Toutes mes illusions sont évanouies. Vous connaissez mon dévouement au bien public et à l’Empire. Accordez-moi une faveur, celle de me nommer quand vous écrirez à S. M. l’Impératrice parmi les personnes qui se souviendront éternellement de ses bontés et de celles de l’Empereur.
Malgré les vaines et stupides clameurs de la rue, et toutes les lâches défaillances de ces derniers temps, l’Empereur peut attendre avec confiance le jugement de la
postérité. Son règne restera comme l’un des plus glorieux de notre histoire. Mon plus grand bonheur eût été de pouvoir présenter ma famille à S. M. l’Impératrice avant
son départ. Un sentiment de discrétion que vous comprendrez aisément m’a seul empêché de solliciter cet honneur.»
Le 15 janvier 1876, poussé par des amis, Louis Pasteur s’est porté candidat aux élections sénatoriales dans Le Jura en déclarant que : « Vivement sollicité de me porter candidat pour représenter notre département dans les élections sénatoriales, l’ai accepté avec reconnaissance et je viens vous demander votre suffrage.
Je ne suis point un homme politique. Je ne suis lié à aucun parti.
N’ayant jamais étudié la politique, j’ignore beaucoup de choses; mais ce que je sais pertinemment, c’est que j’aime ma patrie et que je l’ai servie de toutes mes forces : telle est ma profession de foi.»
Cette candidature fut mal accueillie localement à en croire la réponse de Louis Pasteur au Rédacteur de L’Avenir du Jura «Dans votre numéro du samedi 22 janvier, vous avez bien voulu consacrer quelques lignes à ma candidature au Sénat, que vous n’hésitez pas à j’ai déclaré dans « repousser », parce que ma circulaire aux électeurs que je ne suis point un homme politique, et que je ne suis lié à aucun parti. Combien ma manière de voir diffère de la vôtre! Suivant moi, c’est un des grands malheurs de la France qu’il y ait dans nos assemblées tant d’hommes politiques.[…]Demandez à mes amis ce qu’il leur a fallu d’efforts pour me déterminer à poser ma candidature. Oui, la science est mon culte et ma vie; et, si je ne m’étais senti animé du désir de la servir au Sénat, comme j’espère la servir encore dans mon laboratoire, si Dieu me prête vie, je n’aurais jamais cédé à leurs pressantes sollicitations.[…]»
Dans son ouvrage Jules Grévy ou la République debout, Pierre Jeambrun[efn_note]Jules Grévy ou la République debout, Pierre Jeambrun,Paris – Tallandier, collection Figures de Proue, 1991[/efn_note], relate la séance à l’Assemblée nationale les auditions des candidats : «[…] Lelièvre attaqua la candidature de Paul Besson, le représentant monarchiste à l’Assemblée nationale, qui lui répondit. Puis Pasteur, la poitrine chamarrée de décorations, donna lecture d’un long manifeste, dans lequel il se proclamait « le candidat de la science et de la vraie politique ». L’Assemblée entendit ensuite les candidats républicains, Tamisier et Thurel ; puis le troisième candidat monarchique, le général Picard, n’ayant pas répondu à l’appel de son nom, le président, jules Grévy, prit la parole. La sténographie ne recueillit point ce discours, qui eut une grande influence sur le vote ; mais il resta dans la mémoire de tous ceux qui l’avaient entendu : Vous connaissez, Messieurs, les diverses candidatures qui se sont produites. Vous me permettrez de vous dire quelles considérations doivent, suivant moi, déterminer le vote que vous émettrez demain.
La République est seule possible. Ce fait n’a-t -il pas été constaté, il y a deux ans, d’une façon indiscutable ? Ne se rappelle-t-on pas l’échec éclatant de la suprême
tentative essayée en octobre 1873 par les partis monarchiques pour ramener le gouvernement de leurs vœux ? N’a-t-on pas vu alors ces partis, toujours si unis
pour détruire, se montrer impuissants à rien fonder ? Or, pour garder la République, la première condition est d’avoir un Sénat républicain.
Le Sénat, Messieurs, est un instrument indispensable au fonctionnement de la nouvelle Constitution. La Chambre des députés sera républicaine. Si le Sénat est hostile à la République, c’est la marche des affaires entravée, un conflit engagé entre les pouvoirs, et la suite ordinaire des conflits, Messieurs, c’est une révolution ou un coup d’État. Aussi, le Sénat est-il l’espérance des ennemis de nos institutions, et c’est cette partie de la Constitution qui, dans leur pensée, servira à détruire la Constitution elle-même. C’est ce que j’ai dit à M. Pasteur aujourd’hui, quand il m’a fait l’honneur de me rendre visite. j’ai reconnu que ses travaux scientifiques et son caractère étaient des titres au respect et à l’estime de tous ; et je lui ai expliqué mon regret de n’avoir pas trouvé dans ses opinions politiques une fermeté suffisante. La science a sa place naturelle à l’Institut».»
Le 30 janvier 1876, sur les deux postes à pourvoir, François Tamisier et Jules Thurel, tous les deux républicains sont élus Sénateurs, avec 446 et 445 voix sur 650 voix, le général Picard (parti bonapartiste) obtenant 183 voix, et Besson (monarchiste)153 voix, le dernier candidat Dalloz, s’étant désisté au cours de la campagne électorale. Louis Pasteur n’en n’a obtenu que 62. Son commentaire a été d’écrire à sa fille « … Tout est instruction ». Il avait fait l’expérience d’une courte aventure en politique, mais sans ressentiment ou déception.
Un combat pour la Science malgré les polémiques
Louis Pasteur a subi nombre de controverses et de polémiques concernant l’exactitude des résultats de ses travaux, malgré ses expériences réussies et ses démonstrations devant l’Académie des Sciences. Un de ses plus grands détracteurs a été le biologiste Félix Archimède Pouchet. Ce dernier décède en 1872, ayant lutté 10 ans contre les thèses triomphantes de Louis Pasteur, qui rappelait que : « Le savant doit s’inquiéter de ce qu’on dira de lui dans un siècle et non des injures ou des compliments du jour».
Ces polémiques ne sont pas seulement provoquées par le monde scientifique ou médical. Certains élus politiques y ont aussi contribué, notamment lors du vote d’une loi, en Juillet 1883, accordant une pension à Louis Pasteur.
En effet, en 1874, le parlement vote l’attribution « d’une récompense consistant en une pension viagère de 12000 francs ; cette somme représente à peu près les
émoluments {fixe et éventuel} de la chaire de Sorbonne que la maladie force M Pasteur à abandonner. Elle est bien modique, à coup sûr, lorsqu ‘on la compare surtout avec la valeur des services rendus ».
Le rapporteur du projet de loi, Paul Bert, affirmait que « la Nation Française trouvera juste d’augmenter plus tard le témoignage de sa reconnaissance envers lui et envers la science dont il est l’un des plus glorieux représentants ». Le projet de loi fut voté par 532 voix contre 24.
Mais en Juillet 1883, les débats parlementaires tournent à la polémique lorsque le ministre de l’agriculture, Jules Méline, propose de faire voter une récompense nationale à Louis Pasteur[efn_note]Journal officiel de la République française-Débats parlementaires-Chambre des députés-12 juillet 1883, p.1769 et suivantes[/efn_note]. Dans ces débats, il est traité de « plagiaire » ; le député Benjamin Raspail lit une lettre qui lui a été adressée, et qui commence par : «[…] En présence du projet de loi accordant une pension de 25000 francs par an à M. Pasteur et réversible après son décès sur sa femme et ses enfants, je trouve extraordinaire qu’aucune enquête n’ait été faite pour statuer sur le bien fondé de cette loi.
Monsieur Pasteur, outre sa qualité de savant, n’est ni plus ni moins qu’un négociant qui gagne par la vente de son vaccin […] ».
À ces propos, la majorité des députés souhaitaient accorder la pension, car « nous avons un devoir à remplir » déclarait le député Brière « c’est de mettre bien haut Monsieur Pasteur et de ne pas marchander une dotation au nom de l’agriculture, pour lui rendre hommage et justice, à lui qui a travaillé pour le bien général, qui a rendu d’immenses services à l’agriculture, et de la lui voter, non seulement pour lui, mais réversible sur sa veuve et ses enfants.
Quand Monsieur Pasteur a fait sa découverte, il n’était pas riche, il était pauvre. Récompenser le mérite, c’est notre devoir de députés ; nous n’y faillirons pas et nous décernerons une récompense nationale à Monsieur Pasteur ».
En effet, la Chambre des députés a décidé qu’il bénéficie de cette pension.
L’Institut Pasteur: « Honneur pour la France»
En avril 1895, Pasteur disait «Ah! que de choses encore à faire ». Malade, il tenait encore à savoir où en étaient les recherches de ses élèves et comme le mentionnait René Vallery-Radot, « il redisait le mot de toute sa vie: il faut travailler ». Il meurt le 28 septembre 1895.
Il n’est pas seulement le grand savant qui a vaincu la rage, il est aussi le bienfaiteur qui a souhaité la création « d’un établissement vaccinal contre la rage ».
« L’académie des sciences nomma une commission qui adopta à l’unanimité le projet de créer à Paris, un établissement pour le
traitement contre la rage, sous le nom d’Institut Pasteur ». Une souscription internationale fut décidée. De nombreux pays y contribuèrent.
L’institut fut inauguré le 14 novembre 1888, en présence du Président de la République, Sadi Carnot qui avait déclaré : « Votre Institut est un
honneur pour la France ».

Louis Pasteur y habita jusqu’à sa mort et son corps repose dans la crypte de l’Institut. Fondation privée, à but non lucratif, reconnue d’utilité publique, l’Institut
Pasteur continue l’œuvre de son fondateur, et contribue à la prévention et au traitement des maladies par la recherche, l’enseignement et des actions de santé publique.
Avec ses 30 implantations dans le Monde, 8 prix Nobel attribués à des chercheurs pastoriens depuis sa création, l’Institut Pasteur respecte la mission accomplie par Pasteur toute sa vie : la science au service de l’homme.
« Vivez dans la paix sereine des laboratoires et des bibliothèques » , disait-il en 1892 aux jeunes étudiants[efn_note]DISCOURS prononcé dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne à la célébration du soixante-dixième anniversaire de sa naissance (27 décembre 1892)[efn_note]. « Dites-vous d’abord : Qu’ai-je fait pour mon instruction ? »Puis à mesure que vous avancerez : « Qu’ai-je fait pour mon pays ?» jusqu’au moment où vous aurez peut-être cet immense bonheur de penser que vous avez contribué en quelque chose au progrès et au bien de l’humanité. Mais, que les efforts soient plus ou moins favorisés par la vie, il faut, quand on approche du grand but, être en droit de se dire : «J’ai fait ce que j’ai pu».
Grand croix de la légion d’honneur [ 1881], il reçut de nombreuses distinctions honorifiques et décorations nationales et étrangères.
Près de deux ans avant la célébration du bicentenaire de sa naissance, Louis Pasteur n’a pas à s’inquiéter sur sa postérité qui fait de lui un des plus grands, sinon le plus grand « BIENFAITEUR DE L’HUMANITÉ.